Barev Dzez !
Le 5 mars 2017, notre passage de la frontière arménienne à Bavra s’avère un peu compliqué. Les douaniers nous réclament de l’argent pour régler des taxes de passage, de pollution et d’utilisation des routes (qui sont, soit dit en passant, ultra pourries !).
Le problème est qu’ils veulent 19 750 Dram (soit 38 €) pour 15 jours sur place ou 55 Dollars ! Hugo refuse catégoriquement de régler en dollars et demande à pouvoir retirer des devises locales. Après avoir menacé de bloquer le passage de la frontière, des employés finissent par le conduire avec leur voiture à la ville la plus proche possédant un DAB ! (Un peu têtu le garçon…). Ensuite il faut encore prendre une assurance à l’unique agence ouverte à la frontière (négociée 14 euros pour 15 jours). Et ce n’est que le début des galères de frontière !
Nous roulons sur un plateau haut de 2000 m et la neige est encore bien présente, offrant de splendides paysages et couchés de soleil.
Nous nous rendons rapidement à la capitale Erevan, où l’on espère pouvoir faire plus facilement nos visas iraniens (les seules options proposées à Tbilissi incluaient une attente de 3 mois auprès du consulat (50€ /pers) ou des frais de 450€ /pers. à régler à une agence pour « accélérer » la procédure). De notre bivouac sur les hauteurs de la ville, on se paye une jolie vue « by night ».
Ce jour là, l’ambassade ne s’occupe pas des demandes de visa, le jour suivant est férié ce qui nous oblige à attendre la fin de la semaine pour obtenir le moindre renseignement. La poisse ! En attendant, on part vadrouiller dans la capitale… L’ensemble est assez peu enthousiasmant : l’architecture post soviétique est hyper massive, la ville semble un peu asphyxiée par le manque de moyens et peine à moderniser ses infrastructures. De nombreux chantiers attendent patiemment d’être poursuivis…
En revanche, côté culture, de nombreux musées sont vraiment intéressants. On découvre avec plaisir les œuvres du 20ème siècle de Yervand Kochar…
… ainsi que le musée d’Art Contemporain. Elo se replonge dans ses cours d’infirmière en contemplant une expo dont les œuvres sont conçues à 100% avec du matériel chirurgical. Original !
« La Cascade », œuvre architectural se présentant comme une volée d’escaliers rejoignant le haut de la ville, donne une bouffée de fraîcheur à la ville ! Elle expose tant dans ses extérieurs qu’en son sein, des œuvres d’art libres d’accès ainsi qu’un musée payant. On a adoré le principe !
Du haut de son promontoire, la mère d’Arménie veille sur ses citoyens et affiche un regard sévère semblant vouloir menacer quiconque viendrait encore s’attaquer aux arméniens…
On met aussi notre premier pied en Iran en allant visiter la seule moquée en activité de la ville rénovée grâce à des fonds iraniens. Ca donne envie d’en voir plus…
On quitte la ville pour les alentours en attendant de pouvoir réaliser nos démarches administratives. A Zvarnots, les vestiges d’une cathédrale du 7ème siècle, bâtie sur des colonnes rappelle la forme d’un temple païen. On peut aussi y voir une tablette avec des écritures cunéiformes.
Nous partons ensuite à l’est de la capitale pour nous rendre au monastère de Geghard (le premier d’une longue liste…). Logé au pied d’une falaise, de nombreuses salles sont taillées à même la roche. L’endroit est superbe.
On ressent pour la première fois l’ambiance austère et mystique des églises arméniennes. Petite précision : l’Arménie est le premier état à avoir adopté officiellement le Christianisme comme religion en 301. En 450, elle se sépare du reste de l’Eglise Orthodoxe sur une divergence d’opinion théologique et fonde l’Eglise Arménienne Apostolique. Aujourd’hui, les monastères (toujours situés dans des cadres incroyables) sont la principale attraction touristique du pays.
Sur le chemin du retour, nous nous arrêtons au temple de Garni bâti au 1er siècle ap. J.C. Surplombant les gorges de la rivière Azat, sa structure de style hellénistique a été totalement reconstruite dans les années 70 et le rendu est plutôt impressionnant !
De retour à Erevan, nous allons au mémorial du génocide arménien où nous découvrons avec beaucoup d’émotion les atrocités qui se sont déroulées entre 1915 et 1922. Sur fond de rivalités d’Empires (Ottomans et Russes), de Guerre Mondiale et de volonté d’expansion territoriale, les turcs causèrent la mort d’1,5 millions d’arméniens ottomans en les massacrant ou en les déportant dans le désert syrien. Aujourd’hui, le terme de génocide reste discuté et la Turquie refuse de reconnaître ces meurtres en tant que tel.
Après un nouvel échec au consulat iranien, on descend vers le sud du pays et on prend notre première claque au monastère de Khor Virap. La structure fortifiée se situe au milieu d’une plaine avec en toile de fond, deux monts volcaniques aux pics enneigés : l’Aragats (4090m) et son grand frère turc l’Ararat (5…). Bien souvent camouflés par la pollution, nous avons eu la chance ce jour là de pouvoir les admirer le temps d’un magnifique couché de soleil. (Note : l’Arménie se situant sur un plateau d’au minimum 1500 mètres d’altitude, les monts ne semblent pas si haut et pourtant…).
Le lendemain matin, Léon se trouve un « bolide » dans lequel il nous demande de le « poussssééé ». Ses progrès « linguistiques » sont remarquables de jour en jour…
Nous poursuivons notre route vers le monastère de Noravank qui se situe dans un cadre magnifique et présente une architecture vraiment originale.
A l’occasion d’une promenade champêtre dans la vallée de Yeghegis, on fait la connaissance de la famille Sahakian qui vit dans une grande ferme au bout du monde. Nous sommes très chaleureusement invités à passer la soirée puis la journée du lendemain avec eux.On découvre avec admiration leur mode de vie simple, sain et quasi auto-suffisant (pain, vin, fromage, viande, fruits et légumes, jus, miel…tout est fait maison !). Pendant que Léon joue avec Hovhannes et qu’Hugo garde les troupeaux avec Vlad, Gema et sa belle-mère initient Elodie à la fabrication du lavash (pain traditionnel arménien). Un grand merci à cette belle famille pour ces moments géniaux.
Nous poursuivons notre remontée vers le nord et arrivons au grand lac Sevan. Un peu de tourisme morbide au cimetière de Noratuz pour aller admirer les magnifiques khachkars ancestraux. Ces stèles traditionnelles sont taillées dans la pierre et représentent des croix stylisées ou parfois des motifs géométriques, des fleurs, des animaux voire même des scènes de vie. Cette tradition daterait de l’époque pré chrétienne et il y en aurait plus de 50 000 dans le pays.
Nous apercevons enfin les berges du lac complètement gelé et le joli monastère d’Hayravank.
A l’occasion d’un arrêt au bord du lac, on fait la connaissance de deux gars du coin qui nous invitent à partager « un » verre de vodka et une tranche de gras de porc épicé avec eux. Il est très courant ici de voir des gens s’arrêter entre amis quelque part, musique à fond dans la voiture pour boire un verre, fumer une cigarette ou juste profiter de l’instant.
On décide de bivouaquer sur place (vodka oblige) et on assiste le lendemain matin à un spectacle franchement dingue : des pêcheurs armés de haches brisent la glace pour aller à la pêche au gros ! Ils ont la générosité de nous offrir trois poissons fraîchement attrapés !
Nous quittons les berges du lac et poursuivons vers le nord. Les paysages, moins enneigés, mais toujours très escarpés sont splendides. Le soleil se fait de plus en plus présent, le printemps arrive !
Le tunnel entre Vanadzor et le canyon de Debed étant fermé, on se voit obligé de faire un détour par Stepanavan et suivons une piste qui traverse une vallée isolée somptueuse où se cache le monastère d’Hnevank.
Nous voici longeant le canyon de Debed à l’assaut des nombreux monastères dominant les falaises abruptes.
Le décor est magique bien qu’enlaidi par les cheminés de l’usine d’exploitation de minerais d’Alaverdi (mais qui donne au lieu « un côté dark » comme dirait Hugo).
On bivouaque au bord de la falaise à la sortie du village d’Odzun et à notre réveil, les aigles nous font cadeau d’un bal d’allers et venus dans le canyon. Magique !
Aparté route : les infrastructures routière sont particulièrement mauvaises et les arméniens mauvais conducteurs donc prudence ! La police est très présente. Originalité qui nous a bien plu, on trouve régulièrement au bord des routes des rampes à disposition pour la réparation des voitures. Ingénieux système D…
Et on ne pouvait pas quitter le pays sans avoir goûté un traditionnel khoravats (cuisine au barbecue). Juste avant de passer la frontière, on test les brochettes biens goutûes d’une figure locale…
Nous repassons la frontière vers la Géorgie (7500 Dram de plus) et imprimons le souvenir de cette terre montagneuse décharnée, à la beauté sauvage et à la culture riche. Nous nous souviendrons de l’hospitalité de ce peuple qui a pourtant connu un passé violent et a été mainte fois en danger à tel point que la diaspora arménienne dans le monde est 3 fois plus importante que le nombre d’habitants dans le pays.
A l’heure actuelle, le pays est toujours dans une situation économique et géopolitique délicate. Son taux de chômage est très élevé et la pauvreté se fait ressentir. 2 de ses frontières sur 4 (Turquie et Azerbaïdjan) sont fermées ce qui ne lui laisse un accès direct qu’à la Géorgie et à l’Iran. Le pays est toujours engagé dans un conflit armé avec l’Azerbaïdjan au sujet du territoire du Haut-Karabagh.
En 1991, après la chute de l’URSS et la déclaration d’indépendance de ces pays, la population majoritairement arménienne du Haut-Karabagh réclame un rattachement de la région (qui avait été attribuée arbitrairement à l’Azerbaïdjan par les russes) à l’Arménie. L’Azerbaïdjan refuse et une lutte armée s’engage, se soldant par l’occupation du territoire par les forces arméniennes (laissant le Naxçivan, une enclave isolée Azéri entre l’Arménie et la Turquie). Un accord de Cessez le Feu est signé en 94 et le Haut-Karabagh s’autoproclame indépendant. Mais cette indépendance n’est reconnue par aucun membre de la communauté internationale (pas même par l’Arménie) ce qui fait du Haut-Karabagh une terre azerbaidjanaise occupée. Régulièrement, des échanges de tirs ont encore lieu sur les lignes de Cessez le Feu et l’avenir demeure incertain…
Pour terminer sur une note un peu plus joyeuse, voici notre sélection Art2Rue arménienne…
Hajogh !
Nos salutations cordiales !
Encore un très beau reportage , cette fois sur l’Arménie, pays peu connu par les Français.
Beau voyage !
Votre périple est absolument génial… j’aurai adoré faire cela à votre âge… je me suis contentée de backpaquer avec le lonely planet pour des séjours de 3-8 mois,puis là je suis enbringuée dans le système retraite urssaf prêt immobilier enfant au collège etc etc
continuez, ne vous arrêtez pas, profitez au maximum
super votre périple ,les rentrées d’eau que vous avez eu en Albanie au niveau de la capucine et lanterneau sont elles résolue, si oui de quelles causes provenaient elles .
merci de votre réponse .
Bonjour !!
Désolé pour le délais de réponse mais nous avons eu beaucoup de mal a trouver une connexion internet décente
Les fuites provenaient d’un manque de silicone lors de la pause des lanterneaux, rien de bien grave en définitive
Bon vent a vous
Merci pour ce beau récit qui ne peut que nous donner l’envie d’explorer avec notre camping car ce pays mis en lumière par la disparition de Charles Aznavour.
Le Caucase est vraiment une perle à découvrir et c’est vraiment peu touristique pour le moment, n’hésitez pas