Holà amigos !
Le 15 mars, nous apprenons qu’un discours du président doit avoir lieu pour annoncer la mise en place d’une quarantaine obligatoire dans le pays pour endiguer l’épidémie de Coronavirus qui a atteint l’Amérique. Nous contactons donc nos amis Martha et Francisco de Lima pour qu’ils nous en disent un peu plus. Ils nous confirment l’information : à compter du 16 mars, 0h00, chacun doit se trouver confiner chez soi et ce jusqu’à la fin du mois. Elle nous met immédiatement en contact avec Ani, une cousine vivant à Huaran, un village de la vallée sacrée situé à une cinquantaine de kilomètres de Cusco où nous sommes alors garés dans la rue. Cette dernière nous invite à nous mettre à l’abri chez elle. Le lundi au matin, nous prenons la route et arrivons dans un lieu magnifique. Cette sympathique famille vit dans une superbe maison lovée au creux des montagnes, surplombant le rio Urubamba, bordée de champs de maïs…
Nous prenons nos quartiers dans notre maison roulante garée devant chez eux. Ils nous offrent d’utiliser leurs douches, toilettes et cuisine. Nous faisons rapidement connaissance avec les fils d’Ani et leur famille, installés dans de belles maisons à quelques centaines de mètres les unes des autres… Tous travaillent dans le tourisme sportif (canoë, tyrolienne, randonnée…) et sont voyageurs. Piero, le cadet, est un bon vivant et il nous invite régulièrement à partager un moment convivial.
Léon sympathise avec les petits enfants d’Ani et son mari, et Margaux est aussi choyée.
Nos journées sont rythmées par les séances d’école de Léon, la cuisine, les ballades pour aller rendre visite aux uns et aux autres… Le temps passe plutôt vite malgré une immobilité dont nous avons peu coutume. Léon et Margaux partagent plein de moments ensembles et créent des liens de plus en plus forts.
Comble du bonheur, en parallèle des parties de « spike ball » partagées avec Piero et ses garçons super sportifs, ce dernier invite même Hugo à fabriquer de la bière avec son matériel de pro !
Fin mars, la nouvelle tombe : le confinement est repoussé jusqu’au 12 avril ! Dans la famille d’Ani, tous sont très préoccupés par la situation qui va avoir de lourdes conséquences financières pour eux qui vivent uniquement du tourisme et sont déjà entrain de licencier leur personnel. Ils envisagent que la situation se prolonge à long terme et nous suggèrent donc de prendre une location dans l’hôtel voisin. Nous ne trouvons pas d’accord avec le gérant et décidons donc de chercher une autre solution. Nous prenons contact avec un français vivant dans le village voisin qui nous propose des locations près de chez lui. Mais les autorités refusent catégoriquement de nous laisser entrer dans leur village (malgré notre stricte quarantaine puisque la famille faisait même les courses pour nous).
Finalement, nous nous rendons dans l’éco-lodge d’une amie à lui, se trouvant de l’autre côté de la panaméricaine, dans les hauteurs du même village. Nous louons une chambre et la gérante met à notre disposition une gazinière. Nous négocions le prix en échange d’une participation à l’entretien du superbe espace vert et du potager présents sur place.
Léon retrouve vite ses marques et se remet aux apprentissages ! On organise aussi de petits travaux manuels pour passer le temps qui nous parait un peu plus long maintenant que nous nous retrouvons seuls (la propriétaire et son fils ne semblent pas réellement vouloir partager quoi que ce soit avec nous).
Nous n’oublions pas le 1er avril pour préparer nos poissons et nous faire quelques farces ! Léon adore et regrette que cette tradition ne dure pas tout le mois d’avril !
L’endroit est assez sauvage et la nature aussi est farceuse. Un étrange ballet macabre s’invite au milieu des jouets de Léon. Un énorme insecte ailé a attrapé une tarentule et a l’air bien décidé à en faire son casse-croute. Le spectacle est impressionnant !
La réglementation liée au confinement se durcit et il n’est même plus autorisé de se rendre en voiture faire des courses. Nous devons acheter proche de là où l’on se trouve et s’y rendre à pied ! Le port du masque est obligatoire. Hugo doit donc faire preuve d’astuce pour remonter le dénivelé avec son lourd chargement sur plus d’1 km.
L’ambiance n’étant pas très joviale et le prix encore assez élevé dans cet endroit, Hugo se met à nouveau en quête d’un autre refuge. Il contacte la propriétaire d’une auberge située à 400 mètres de là par le biais d’Airbn’b. Tania se concerte longuement avec sa grande famille et les dirigeants de son village et finit par accepter de nous recevoir dans son havre de paix. Nous sommes reçus à bras ouvert par Papa Mario, ses 3 filles Tania, Naywitay et Tuki, ses 2 petits-enfants Joachin et Alba, les jeunes de communautés indigènes vivant sous son toit et Alicia, la cuisinière. En échange d’un loyer et de notre aide aux tâches quotidiennes, ils nous offrent le gîte et le couvert que nous partageons avec eux comme des membres de leur famille…
Nettoyage du lichen dans le verger, récolte des maïs, semaison du potager, épandage de purin d’ortie, cuisine, entretien des enclos des lapins, cochons d’inde, poules, canards, oies… Le travail ne manque pas dans cette ferme-auberge reconvertie en exploitation agricole à l’occasion de cette crise sanitaire !
Et quand la nuit tombe, on poursuit dans la cuisine : on égraine, on pèle et on mout le maïs pour en faire des pasteles de choclo (gâteau de maïs) et des humintas (pâte de maïs mélangée à du fromage, cuite à la vapeur dans les feuilles de maïs). Du maïs, du maïs et encore… du maïs ! Mais on travaille dans la joie et la bonne humeur, on fait connaissance… On se sent bien !
Et on attend chaque jour avec impatience, les repas délicieux et roboratifs d’Alicia ! Pour pallier à la crise et à l’absence de revenus liés au tourisme, la famille tente, autant que possible, de vivre en autosuffisance. Ils dépendant encore du lait, du beurre, du fromage, des œufs (les poules sont jeunes), du riz, des pâtes et de la farine de blé achetés en quantité industrielle au marché pour nourrir tout ce beau monde. Mais pour leur reste, nous mangeons les fruits, les légumes, le maïs et bientôt la viande de la maison, le tout cultivé sans aucun produit phytosanitaire.
Léon est comme un poisson dans l’eau ici, ou plutôt, un coq en pattes ! L’endroit est immense. Il passe le plus clair de son temps dehors avec les enfants âgés de 7 ans. Il prend vite le plis et aide aux différentes tâches de la maison. Il se gave de fruits mûrs cueillis sur l’arbre. Il devient même copain avec les 4 chiens de garde de la maison !
Margaux, elle, devient vite la chouchoute de la maison ! On partage ensemble, ses découvertes et ses premières fois.
A l’approche de Pâques, Elo fabrique des chocolats avec un reste de pâte de cacao d’Equateur et organise une chasse aux œufs mémorable sous forme de jeu de piste à travers la ferme. Les enfants sont ravis. Léon est aux anges ! Il nous confie qu’il se souviendra longtemps de cette belle journée !
On apprend que la quarantaine est à nouveau repoussée jusqu’au 26 avril mais même pas peur ! la famille Herrera est prête à nous garder dans sa Casita Huaran le temps qu’il faudra… Notre famille, en revanche, commence à s’inquiéter de notre avenir dans un pays qui n’est pas prêt à sortir du confinement et possède un système de santé précaire. Elle nous informe d’un avertissement de l’ambassade concernant l’impossibilité de rapatrier les ressortissants français à compte du 22 avril, date de fermeture totale de l’espace aérien péruvien. Nous sommes alors face à un énorme dilemme : attendre la levée du confinement, qui peut survenir à très très long terme, dans cet endroit paradisiaque où l’on se sent si bien mais dans un pays qui peut basculer vers une crise sanitaire et sociale majeure à tout moment ; ou, quitter cette belle famille, nous rendre à Lima sans être certains d’avoir un vol de rapatriement et rentrer en France où l’offre de soin est 100 fois meilleure qu’ici mais, ainsi, mettre un terme à notre mode de vie rêvé…
Après une longue réflexion, nous faisons le choix difficile de rentrer en France. Nous quittons donc avec tristesse la famille Herrera et ses belles valeurs d’humanité, de solidarité, de partage, cette famille qui nous a tendu la main dans un contexte qui, pour beaucoup, aurait justifié de nous fermer la porte au nez. Merci à vous ! Nous ne vous oublierons jamais…
Armés d’un document de l’ambassade certifiant notre nécessité de nous rendre à Lima et d’une lettre de Mario, gouverneur adjoint de sa juridiction, nous partons lundi 20 avril à l’aube pour 1200km à travers les Andes. Après 700 km, 14 barrages de police, des milliers de virages et des cols à plus de 4600 mètres d’altitude, nous entamons la dernière descente vers la ville de Nazca où nous admirons un dernier coucher de soleil sur les Andes. Nous sommes emplis de nostalgie à la pensée de tous ceux qui ont déjà bercé la fin de ces milliers de journée de voyage et regrettons déjà tous ceux que nous ne verrons jamais… Arrivés à Nazca, c’est la douche froide ! L’ambassade ne nous a toujours pas appelés pour nous vendre les billets pour le vol du 22 avril et nous annonce qu’il est peu probable que nous ayons des places. Nous nous arrêtons dans la maison d’Edgardo, rencontré lors de notre premier passage ici. Les voisins débarquent hystériques, pour nous demander de partir sous peine d’appeler la police. Après discussion et l’aide du propriétaire, nous sommes autorisés à rester jusqu’au lendemain matin…
Le mardi 21, sans autre choix, nous nous dirigeons donc vers Lima. Nous apprenons que nous n’avons effectivement pas de place sur le vol. Nous nous rendons à l’appartement de location de la nièce de Martha et Francisco qui nous le prête jusqu’à notre départ. On tente tout pour avoir ces places sur ce vol censé être le dernier organisé par l’ambassade jusqu’à nouvel ordre. Mais rien à faire ! C’est un échec cuisant et nous nous retrouvons dans la position que nous redoutions, bloqués à Lima, sans possibilité de faire demi-tour. Par chance, la gentillesse de ces gens n’a pas de limite et on nous permet de rester ici le temps qu’il faudra. Nous nous adaptons donc encore une fois à ce nouvel environnement. Le studio est très confortable et nous permet de cuisiner tous les jours des bons petits plats variés (Hugo nous fait des yaourts, des pâtes à pizza et des baguettes avec du levain maison !)
Le confinement est strict. Nous n’avons le droit de sortir avec les enfants sous aucun prétexte (en dehors d’une urgence medicale), nous devons aller faire les courses à pied avec masque et gant. Hugo voit des gens se faire embarquer par la police car ils n’en portent pas !
Nous occupons les journées à coup de jeux, lecture, danses, sport. Les jours passent, puis les semaines, jusqu’à avoir enfin des nouvelles de l’ambassade qui semble organiser un nouveau vol vers Paris le 11 mai. Nous sommes soulagés de savoir que nous allons enfin pouvoir sortir de cette mégapole qui nous est inconnue et où nous sommes enfermés derrière des vitres 24h sur 24. Mais ce retour signe aussi pour nous une rupture, la fin d’une tranche de vie.
Nous partageons avec vous, peut-être pour la dernière fois, nos clichés de la nature riche et colorée qui nous a entourés pendant ces semaines de confinement à Huaran. Nos derniers cadeaux de la Pachamama avant notre départ…
Aujourd’hui, nos billets en poche, la cellule stockée dans la société de nos amis à Lima, nous planifions de nous mettre en quarantaine 15 jours à Sanary-Sur-Mer, dans un appartement que nous prête les parents d’Hugo avant de pouvoir profiter des retrouvailles en famille. La suite est encore floue… Retour dans notre petit appartement de Romans, reprise du travail, d’une routine ou peut-être retour au Pérou dans quelques mois ??? Pleins d’inconnues qui nous laissent entrevoir de nouvelles aventures.
Nous imprégnons notre mémoire de ces parfums de citron vert, fruit de la passion, de fleurs de frangipanier, de ces embruns d’océan, de ces images de montagnes enneigées sur des routes désertes, de lacs endormis, de rivières gelées, d’animaux sauvages s’enfuyant dans les plaines, d’oiseaux tropicaux traversant le ciel et de leur chant qui nous réveille le matin. Tous ces petits rien qui ont bercé notre quotidien ces dernières années et que nous regrettons déjà…
Merveilleux reportage malgré toutes les difficultés que vous endurez !
Vos sourires et la gentillesse des personnes qui vous accueillent prouvent que la solidarité existe encore dans ce monde « fou »…
Bon retour en France, j’espère le meilleur pour vous 4.
Bonjour Michèle,
tout à fait, cette expérience nous aura une fois de plus appris cela. Malgré la peur ambiante que peut susciter cette crise sanitaire, nous avons trouvé des gens prêts à dépasser cela et à privilégier la solidarité entre humains en toute circonstance. Une chance inouïe ! Merci encore pour votre soutien indéfectible !
Bon retour et courage pour la…quatorzaine…
À bientôt ✌️ à Romans
Merci, à bientôt !
nous vous souhaitons un bon retour malgré l’obligation de mettre une fin à votre voyage et nous espérons que ce sera temporaire!
Merci ! Cette question reste pour l’instant en suspend et nous allons attendre de voir comment les choses évoluent avant de prendre une décision. Il est difficile de se résigner à mettre un terme à ce voyage de cette manière là et je rêve de voir notre petite Margaux en couche culotte au milieux de tous ces paysages , comme a eu la chance de le vivre son frère. Mais pour l’instant, les choses me semblent compliquées…
Heureux de voir l’épilogue de cette aventure. Bonne rentrée en France, et à très bientôt sur le forum de la tortue de felix.
Michelangelo.
Merci ! Nous espérons que cet épilogue soit avec trois point de suspension… A très bientôt !
C’est aujourd’hui le jour J !
Bon courage pour les heures de vol et l’arrivée à Sanary sur mer
Et nul doute qu’on vous retrouvera très bientôt de retour au Pérou pour la suite de vos aventures lorsque nous serons débarrassé de cette saloperie de Covid 19
Jean-Marie alias Philéas
Finalement ce retour a été plus compliqué que prévu. Notre vol de lundi a été annulé, reprogrammé mardi puis annulé de nouveau. Nous sommes finalement parti mercredi, le voyage a été long et complexe puisque nous sommes partis de l’aéroport militaire de Lima. Nous sommes arrivés jeudi matin à Paris puis avons du attendre un TGV à 17H00 pour Marseille. Mais ça y est ! Les bagages sont posés pour les prochaines semaines à venir… A bientôt pour d’autres nouvelles !
Heureux de savoir que le « calvaire » de Lima se termine aujourd’hui, mais comme je comprend ce dilemme de quitter ce pays si cher à notre cœur que j’espère vous pourrez retrouver dans des jours meilleurs.
Grosses bises à vous quatre.
La quarantaine à Sanary nous rapproche, bonne retrouvaille en famille .
Nicole et Maurice
Oui la décision fut vraiment très difficile à prendre. Je pense que nous avons changé au moins 15 fois d’avis et encore plus dans notre fort intérieur. Je crois que je changeais d’avis à peu près toutes les 5 minutes… C’est très difficile pour Léon qui a du mal à digérer le départ. Il est très triste bien qu’heureux aussi de retrouver ses grands-parents. Je pense que tous ces sentiments doivent être compliqué à gérer pour lui. Bise à vous aussi. Je ne me souviens plus dans quelle ville vous êtes mais je crois me souvenir que c’est sur la côte d’Azur…
Ouf, enfin, je comprends ton état d’âme !!!
Nous sommes à; La tour d’Aigues dans le Vaucluse.
Bises
La fin de votre texte est très émouvante. Un gros pincement au coeur. J’espère que vous pourrez repartir… dès que…
La vie nomade nous manque beaucoup aussi et cette autre façon de voir le monde, et d’envisager l’existence.
bon retour quand même
Lise
what you don’t do around „to jump out of the frying pan into the fire“!?? –
you are made for adventure so you can survive only in adventure!
… but even for you is „home- a sweet home“ – under the condition that home – every day another home is!
« Faites votre volonté » – aujourd’hui – que demain il veut autre chose de toute façon!
… und trotzdem: Willkommen nach Hause! – denn nur von Zuhause könnt ihr weiter gehen! … anderswo – seit ihr „nur unterwegs“!
Love you all!